HOAH - Regards en coin, visages choqués, expressions interloquées: dans les rues de Tel Aviv, on dévisage toujours Ayal Gelles avec curiosité. En cause, le long tatouage qui court sur son avant-bras. A-15510. Le matricule attribué à Avraham Nachshon, son grand-père, raflé à 17 ans et rescapé d’Auschwitz.
Si aujourd’hui le jeune homme de 28 ans arbore fièrement ce numéro, cela n’a pas toujours été aussi simple. "Le cheminement a été long, douloureux. J’étais taraudé depuis longtemps par l’envie de le faire mais ce n’est qu’au terme d’un processus très lent, d’une maturation qui a duré des années que je me suis décidé", raconte Ayal. "A la fin de mon service militaire, en 2009, je suis parti voyager en Amérique du sud comme beaucoup d’Israéliens. Un jour, en Argentine, j’ai vu un troupeau de vaches aller à l’abattoir, un numéro tatoué sur l’oreille. Cette vision d’animaux qu’on traînait vers la mort et dont l’identité était réduite à un numéro m’a bouleversé. Cela m’a rappelé ce que mon grand-père avait subi. Ce jour là, je suis devenu un végétarien fervent et j’ai pris la décision de me faire tatouer à la fin de mon voyage", se souvient-il.
Comme Ayal, ils seraient aujourd’hui des dizaines en Israël à avoir fait encrer sur leur peau un matricule de déporté. Témoins privilégiés de ce phénomène, les réalisateurs Dana Doron et Uriel Sinai leur ont donné la parole dans Numbered, un documentaire présenté l'été dernier au Festival du film de Jérusalem. Les survivants et leurs proches y confient leurs histoires familial